Diphtérie

Définition

La diphtérie est une maladie provoquée par les corynébactéries du complexe diphtheriae (C. diphtheriae, C. ulcerans et C. pseudotuberculosis) sécrétrices de la toxine diphtérique.
Les souches productrices de la toxine sont lysogènes pour un bactériophage ß qui apporte le gène tox codant cette toxine.

Épidémiologie

La diphtérie due à C. diphtheriae est une maladie hautement contagieuse, strictement humaine. Le mode de contamination le plus fréquent se fait par contact direct avec un malade ou un porteur sain, via des sécrétions oropharyngées.

La diphtérie due aux espèces C ulcerans et C. pseudotuberculosis  sont des zoonoses. En effet, il n’y a pas de transmission humaine  :

  • C. ulcerans se transmet par le lait cru ou les animaux de compagnie (chats et chiens).
  • C. pseudotuberculosis se transmet par les caprins.

En France, on a diagnostiqué 5 cas de diphtérie à C. diphtheriae entre 1989 et 2010 puis 5 autres cas en 2011 et 2012. La grande majorité de ces cas sont dus à des souches importées.

En ce qui concerne C. ulcerans,  on a identifié 33 cas entre 2003 et 2014. Source INVS.

Manifestations cliniques

Après une incubation de 2 à 6 jours en moyenne, les malades présentent une angine, peu fébrile et caractérisée par l’apparition de fausses membranes grisâtres, extensives, adhérant solidement à la muqueuse sous-jacente et recouvrant les amygdales, les piliers et le voile du palais. C’est une angine pseudo-membraneuse.
Dans quelques cas, l’extension de ces fausses membranes au larynx peut conduire au décès par asphyxie. On appelle cette forme le croup.
La toxine diphtérique est ensuite responsable de paralysies périphériques :

  • paralysies du voile du palais (se caractérisant par des difficultés pour parler et déglutir),
  • paralysies des muscles moteurs de l’accommodation visuelle (impossibilité d’observer des objets proches),
  • des paralysies flasques des membres et en particulier des muscles respiratoires nécessitant quelquefois une assistance respiratoire.

La myocardite aiguë est la complication majeure. Elle peut conduire à une insuffisance cardiaque aiguë responsable de la plupart des décès. On la dépiste avec un électrocardiogramme.

Il existe également des formes cutanées qui se caractérisent par la présence de fausses membranes sur une plaie.

Physiopathologie

Corynebacterium diphtheriae colonise la muqueuse oropharyngée et produit la toxine diphtérique.

La toxine agit dans un premier temps localement en détruisant l’épithélium, ce qui provoque une réaction inflammatoire. L’épithélium nécrosé se recouvre d’un exsudat fibrineux riche en polynucléaires neutrophiles qui donne naissance aux fausses membranes.
Alors que Corynebacterium diphtheriae reste localisé au pharynx, la toxine diphtérique passe dans le sang et diffuse dans tout l’organisme.

Cette toxine affecte la plupart des organes (elle est dite pantrope) avec une certaine prédilection pour le myocarde et le système nerveux périphérique. Elle détruit les cellules cibles en inhibant la synthèse protéique.
Cette toxine est de nature protéique et est constituée de deux sous-unités A et B.
La sous unité B permet la fixation de la toxine sur un récepteur présent à la surface de nombreuses cellules (le récepteur est le pro HB-EGF). Les deux sous unités se séparent et la sous unité A pénètre dans le cytoplasme de la cellule.
Cette sous-unité A catalyse l’ADP-ribosylation du facteur d’élongation ribosomal EF2, ce qui entraine l’inactivation de ce facteur. Or ce facteur est nécessaire à la traduction des ARN messagers par les ribosomes (plus précisément il est nécessaire à l’étape de translocation).


Mode d’action de la toxine diphtérique

Prévention

La vaccination antidiphtérique est une vaccination antitoxinique qui protège contre les manifestations toxiniques des bactéries porteuses du gène tox. Le vaccin contient une anatoxine diphtérique. Cette anatoxine est obtenue en traitant la toxine diphtérique avec du formol à 4%, à 40°C pendant 4 semaines (procédé mis au point par Ramon en 1923). Ce traitement fait perdre à la toxine son pouvoir pathogène mais elle conserve son pouvoir immunogène.

En France, cette vaccination est obligatoire pour les enfants avant l’âge de 18 mois et pour les professionnels de santé.

La primo vaccination comprend trois injections à un mois d’intervalle à partir de l’âge de 2 mois et un rappel entre 16 et 18 mois d’âge

On recommande de faire des rappels aux âges de 6 ans, 11-13 ans, puis entre les âges de 16 et 18 ans et ensuite tous les dix ans (cf. calendrier vaccinal en vigueur). Comme la maladie continue de sévir dans certaines régions du monde (Europe de l’Est, Inde, Asie du Sud-Est, Afrique…), il est important d’être à jour de ses rappels pour tout adulte.

Traitement des malades et des cas contact

On doit rapidement isoler les malades. Le traitement repose sur la neutralisation rapide de la toxine par sérothérapie associée à une antibiothérapie (amoxicilline et érythromycine) pour arrêter la production de toxine et éliminer C. diphtheriae.

La diphtérie est une maladie à déclaration obligatoire. La fiche de notification est téléchargeable sur internet.

Les mesures préventives recommandées par l’INVS en 1998 sont les suivantes :

  • surveillance clinique : pour recherche de signes de diphtérie pendant 7 jours à partir de la date du dernier contact avec le cas.
  • investigation microbiologique : par un écouvillonnage nasal et pharyngé pour culture en précisant de rechercher C. diphtheriae. Le résultat de ces cultures ne modifie pas l’antibioprophylaxie mais permet l’identification de porteurs asymptomatiques qui seront isolés (exclusion de l’environnement de travail, de l’école) et contrôlés bactériologiquement après antibioprophylaxie.
  • antibioprophylaxie : elle est nécessaire pour rompre la chaîne de transmission et concerne tous les contacts proches
  • vaccination : tous les individus ayant été eu un contact rapproché avec un malade  doivent recevoir une dose de vaccin.
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