Examen cytobactériologique des urines (ECBU)

L’ECBU est l’analyse la plus demandée au laboratoire de microbiologie médicale.

Il permet de :

  • mettre en évidence des signes d’inflammation de l’arbre urinaire (traduits par une leucocyturie)
  • identifier, dénombrer et étudier la sensibilité aux antibiotiques de l’agent pathogène.

L’interprétation de l’ECBU repose sur 5 critères :

  • leucocyturie,
  • bactériurie,
  • classe d’uropathogénicité des espèces isolées.
  • nombre d’espèces isolées
  • contexte clinique (symptômes, antécédents médicaux, grossesse, sondage urinaire,..)

Cette interprétation n’est pas toujours aisée, elle exige que la prescription soit accompagnée de certains renseignements et que les modalités de prélèvement, de transport et de conservation de l’urine soient scrupuleusement respectées.

PLAN

 

 

Exigences préanalytiques

Renseignements utiles à l’interpréation de l’ECBU

Une fiche de renseignements doit accompagner le prélèvement mentionnant :

  • les indications de l’ECBU : les symptômes cliniques, le contexte de prescription (suspicion d’IU, contrôle préopératoire et postopératoire en urologie, contrôle après traitement d’une infection urinaire…) ;
  • le mode de recueil de l’urine ;
  • le port d’une sonde urinaire ;
  • les particularités du patient : âge, sexe, notion d’hospitalisation actuelle ou récente, grossesse éventuelle en précisant la date des dernières règles ;
  • la présence de pathologies préexistantes : diabète, immunodépression, anomalie de l’appareil urinaire, infection urinaire récidivante ;
  • l’existence d’un traitement antibiotique ou chimiothérapeutique récent ou en cours.

Recueil de l’urine vésicale

L’urine ne doit pas être souillée par la flore commensale de voisinage (digestive et/ou vaginale) qui colonise l’urètre et la région périnéale ni par la flore des mains du patient. Cette contamination est très fréquente, notamment par les sécrétions vaginales chez la femme. Les conditions d’asepsie doivent être rigoureuses et bien expliquées au patient lorsqu’il réalise lui-même le recueil.

Chez l’adulte et l’enfant, le recueil est dit « à la volée » ou « du milieu du jet »

Le patient réalise lui-même le prélèvement en respectant les consignes suivantes :

  • recueil dans un flacon stérile (20-30mL) ;
  • de préférence le matin car il faut que les urines aient séjourné au moins 3 ou 4 heures dans la vessie (temps nécessaire pour permettre la multiplication des germes) ;
  • après lavage des mains et nettoyage soigneux du pourtour de l’orifice urinaire, à l’aide d’une compresse stérile imprégnée d’un soluté de Dakin ou de savon antiseptique ;
  • recueil des urines en milieu de jet afin d’éliminer les bactéries de la flore commensale de l’urètre antérieur (donc éliminer le 1er jet urinaire) ;
  • ne pas toucher le bord supérieur du flacon avec les doigts ou les parties génitales.

Il faut préciser l’heure du recueil sur le flacon.

Chez le nourrisson et le jeune enfant jusqu’à 3 ans

Le prélèvement à la volée est réalisable.

Cependant le prélèvement le plus fréquent mais aussi le plus critiqué utilise un collecteur d’urine. Après une désinfection soigneuse du méat urinaire, on place, autour de l’orifice urinaire, une poche plastique stérile adhésive. Dans tous les cas, la poche ne doit pas rester en place plus de 30 minutes. On transvase ensuite les urines dans un pot stérile.

Fig.7 : Collecteur d’urine

Chez un porteur de sonde urinaire

Il existe sur la sonde urinaire, une zone dédiée au prélèvement. Après désinfection de cette zone à l’alcool iodé, l’urine est prélevée à l’aide d’une seringue montée d’une aiguille fine (Fig. 8). Il ne faut jamais recueillir les urines dans le sac collecteur car les germes y prolifèrent.
On peut aussi recueillir l’urine à partir d’une sonde neuve lors d’un changement de dispositif pour éliminer toute possibilité de souillure par des bactéries adhérentes à la paroi interne de la sonde.

Fig. 8 : Sondage urinaire
Source cclinparisnord

La ponction sus-pubienne

Exceptionnellement utilisé, ce geste consiste à prélever l’urine, de manière stérile directement dans la vessie au travers de la paroi abdominale. La qualité bactériologique de ce mode de prélèvement est évidemment excellente, mais il présente l’inconvénient pour le malade d’être inconfortable. La ponction sus-pubienne permet :

  • de savoir s’il y a infection, dans le cas d’un faible nombre de germes ;
  • de connaître l’identité du ou des germes présents dans la vessie, dans le cas d’une urine polymicrobienne ou chez un patient sondé.

Conservation et acheminement au laboratoire

La bactériurie est un critère majeur pour l’interprétation de l’ECBU. Pour ne pas surestimer la bactériurie, il est donc indispensable d’empêcher la multiplication des germes.

La meilleure des solutions consiste à ensemencer immédiatement les milieux de culture (moins de 2 heures dans le cas d’une conservation à température ambiante).
Comme ce n’est pas toujours possible, de nombreux laboratoires utilisent actuellement des tubes contenant un stabilisateur de la croissance bactérienne (comme l’acide borique). Ils permettent de conserver les urines pendant 48 heures à température ambiante.
Il est possible de conserver les urines à + 4 °C jusqu’à 24 heures mais les leucocytes risquent de s’altérer au-delà de la 12ème heure.
Enfin dans certains services et aussitôt après le prélèvement, le personnel soignant plonge dans l’urine une lame utilisée pour le dénombrement (voir technique de la lame immergée). Le laboratoire reçoit l’urine accompagnée de la lame immergée ensemencée.

Examen macroscopique

Une urine normale est jaune et limpide.
Il est indispensable d’homogénéiser les urines avant de les observer. On note :

  • la présence ou pas d’un trouble : un trouble correspond souvent à une infection bactérienne mais la présence de nombreux cristaux peut également troubler l’urine ;
  • la couleur : une coloration rose ou rouge de l’urine permet de suspecter une hématurie mais certains traitements médicamenteux comme la prise de rifampicine peuvent également colorer l’urine.

Les urines d’apparence limpide sont infectées seulement dans 5 % des cas.

 

Examen cytologique

Le diagnostic des infections urinaire demande une cytologie quantitative pour certains éléments comme les leucocytes.
Après avoir longtemps utilisé des dispositifs de dénombrement manuels, les laboratoires s’équipent désormais d’automate de cytologie urinaire.
Une page est dédiée aux dispositifs de dénombrement manuels et une autre aux automates de cytologie urinaire.

 

Leucocyturie

Une leucocyturie > 104/mL signe une réaction inflammatoire consécutive à une infection urinaire.

Attention : un patient porteur d’une sonde à demeure montrera quasi constamment une leucocyturie. Ce paramètre n’a donc pas de valeur chez ces patients. C’est également le cas des sujets présentant une vessie neurologique (trouble urinaire dû à un dysfonctionnement ou à une lésion du système nerveux).

Le diagnostic de l’infection urinaire ne peut donc pas se limiter à ce seul paramètre (voir interprétation des résultats)

Une leucocyturie < 104/mL indique qu’il n’y a pas de réaction inflammatoire ce qui permet souvent d’exclure une infection urinaire sauf chez le sujet neutropénique ou s’il s’agit d’une infection débutante.

 

Hématurie

Une urine normale contient moins de 1 000 hématies/mL

Une hématurie > 104/mL est anormale. Les hématies intactes ont une forte probabilité de provenir de la vessie ou de l’urètre. Les hématies altérées viennent du rein.

L’hématurie s’observe dans les cas suivants :

  • formes hémorragiques des néphrites : on peut alors découvrir des cylindres hématiques à l’examen du sédiment ;
  • atteinte glomérulaire ;
  • cystites hémorragiques qu’elles soient tuberculeuses, gonococciques ou à germes banals ;
  • tuberculose rénale ;

L’hématurie peut être associée aussi à d’autres affections d’étiologie non infectieuse : lithiase rénale, tumeurs de la vessie.

 

Test HLM ou compte d’Addis

Voir la page le test d’Addis

Cellules épithéliales

Des cellules épithéliales peuvent être retrouvées en petite quantité dans l’urine : elles proviennent du renouvellement normal de l’épithélium urinaire de surface (exfoliation). Suite à une pathologie cette exfoliation peut être accentuée et le type de cellules observé pourrait, en théorie, permettre de déterminer si l’infection urinaire est haute ou basse. En pratique, c’est difficile car les conditions de leur cheminement le long des voies urinaires et le milieu urinaire ne sont pas favorables au maintien des structures cellulaires.

En routine, sur une préparation à l’état frais de l’urine homogénéisée, on se contente de différencier :

  • les cellules urothéliales ;
  • les cellules rénales ;
  • et les cellules pavimenteuses.

Pour chaque type, il faut quantifier les résultats : rares, quelques, assez nombreuses, nombreuses, très nombreuses.

Les cellules provenant de l’urètre, de la vessie ou du bassinet

On les appelle aussi cellules urothéliales (Fig.9) ou encore cellules de transition : leur forme change légèrement selon le lieu. Par exemple la cellule typique de la vessie est ronde avec un noyau rond au centre. Mais les cellules urothéliales sont aussi souvent piriformes, parfois ovalaires, avec un noyau lui aussi ovalaire et relativement petit par rapport à la taille de la cellule.


Fig. 9 : Cellules urothéliales

Leur taille varie de 2 à 4 fois la taille d’un leucocyte.

Elles peuvent être nombreuses lors d’infections urinaires basses.

 

Les cellules provenant du rein (cellules rénales ou tubulaires)

Elles sont rondes, réfringentes et le cytoplasme est légèrement granuleux. Le noyau est rond et en général, au centre de la cellule.

Fig. 10 : Cellules rénales

Leur taille est d’environ 1,5 fois la taille d’un leucocyte.

Elles peuvent être nombreuses lors d’infections urinaires hautes.

 

Les cellules pavimenteuses vaginales

Elles ne proviennent pas des voies urinaires mais des organes génitaux externes de la femme : ce sont de grandes cellules à petit noyau.

Fig. 11: Cellules vaginales

De nombreuses cellules vaginales associées à la présence de Lactobacillus (bacilles Gram positif droits) sont le signe d’une contamination vaginale du prélèvement : le prélèvement est alors impropre à l’analyse.

 

Cylindres

Les cylindres sont des éléments de grande taille épousant la forme d’une partie des tubules rénaux.

Formation des cylindres

Au cours d’une néphrite ou d’une pyélonéphrite, les glomérules défaillants laissent filtrer des protéines (habituellement elles sont absentes de l’urine).

Dans une première étape se forme donc un moule protéique, les protéines étant précipitées lorsque l’acidité et la concentration de l’urine atteignent des valeurs suffisantes. À ce stade apparaissent dans l’urine des cylindres exclusivement protéiques : les cylindres hyalins.

A partir du moule protéique, peuvent se constituer d’autres types de cylindres selon que s’ajoutent à la matière fondamentale diverses cellules présentes dans le tubule rénal :

  • leucocytes : cylindres leucocytaires ;
  • hématies : cylindres hématiques ;
  • cellules épithéliales : cylindres épithéliaux (beaucoup plus rares).

Remarque : Il existe aussi des cylindres mixtes.

Lorsque les leucocytes ou les cellules épithéliales tubulaires dégénèrent, leur contour devient moins net, le cytoplasme plus granuleux : on les appelle cylindres granuleux.

Lieu de la formation des cylindres

C’est au niveau du tubule distal et du tube collecteur que l’urine se concentre et s’acidifie suffisamment pour permettre la formation des cylindres. Il est rare qu’un cylindre se forme au niveau du tube proximal (c’est le cas pourtant des cylindres hyalins accompagnant le myélome multiple, et composés principalement de la protéine de Bence Jones).

Selon leur lieu de formation, la forme et les dimensions des cylindres seront variables.

Fig. 12 : Lieux de formation des cylindres

 

Observation au microscope à l’état frais

On réalise une évaluation semi-quantitative sur le sédiment urinaire (culot de centrifugation) ou sur l’urine entière.
Les cylindres peuvent être courts ou longs : ils traversent alors presque tout le champ au grossissement X400.

Tableau 7 : Description des cylindres urinaires

Fig.13 : Cylindres urinaires

Signification d’une cylindrurie

  • La présence de quelques cylindres hyalins dans une urine n’a pas une grande signification. On peut l’observer chez des individus normaux lorsque l’urine est très concentrée ou très acide, ou encore après un effort musculaire très intense. L’excrétion de cylindres hyalins peut accompagner d’autre part n’importe quelle protéinurie quelle qu’en soit l’origine.
  • L’observation de cylindres hyalins en nombre important indique, par contre, une affection sévère du parenchyme rénal.
  • La présence de cylindres cellulaires (leucocytaires, hématiques, épithéliaux, granuleux) est presque toujours pathologique et signe alors une néphrite grave.
  • Les cylindres graisseux sont rares et s’observent dans les cas de néphrose lipoïdique.

Cristaux

Bien que les cristaux ne soient pas des cellules, leur recherche est abordée ici car elle se fait en même temps que l’étude cytologique.

Les résultats de la cristallurie varient considérablement en fonction du mode de conservation de l’urine : la réfrigération du prélèvement (mais aussi le pH urinaire) augmentent considérablement la fréquence, le nombre et la taille des cristaux. Le prélèvement idéal est une urine fraîchement émise et conservée à 37°C. A défaut une urine conservée moins de 2 heures à température ambiante (20°C minimum) peut être utilisée.

Observation à l’état-frais

L’étude qualitative et semi-quantitative des cristaux est effectuée en observant un état frais de l’urine homogénéisée au grossissement X400. Les résultats sont rendus en donnant des indications relatives à leur nombre : rares, quelques, assez nombreux, nombreux, très nombreux pour chaque cristaux identifié.

Signification d’une cristallurie

  • La plupart des cristaux faits de substances normalement présentes dans l’urine n’ont pas de valeur diagnostique. C’est le cas des cristaux d’oxalate de calcium, de phosphate de calcium, de sulfate de calcium, d’acide urique et urates, de leucine, de tyrosine, de médicaments, de cholestérol. On pourrait penser que la présence de cristaux urinaire est un facteur de risque de lithiase et pourtant la plupart des personnes avec une cristallurie ne formeront jamais de calculs.
  • Seule la présence en abondance et à plusieurs examens de cristaux de même nature est en faveur d’une lithiase rénale en formation. En France l’incidence des calculs est de 2 à 5 % de la population générale ce qui représente de 1 à 2 % du total des entrées aux urgences.
  • Cas particuliers :
    • La présence de cristaux de phosphates ammoniaco-magnésien (encore appelés struvite ou phosphates triples), est un indice d’infection urinaire à germes ammoniogènes (germes uréase + et donc producteur de NH3) comme Proteus, Klebsiella, Corynebacterium urealyticum, Ureaplasma urealyticum etc. On les retrouve dans les urines alcalines. (voir paragraphe 3.2). La struvite représente seulement 1,3 % des calculs.
    • Les cristaux de cystine sont présents chez des patients atteints de cystinurie : maladie génétique responsable de troubles de la réabsorption des acides aminés dibasiques (lysine, arginine, ornithine, cystine). Seul un faible nombre de ces patients formeront des calculs

Examen bactériologique

Examens microscopiques

État frais

La recherche de germes à l’examen microscopique se fait simultanément à la détermination de la leucocyturie en cellule de dénombrement. Une estimation de la bactériurie est alors possible mais le résultat, très approximatif, ne permet pas de différencier les bactéries mortes des bactéries vivantes. Comme les levures cultivent lentement sur les milieux habituellement ensemencés, leur observation à l’examen direct invite à ensemencer des milieux adaptés (exemple : gélose Sabouraud ou milieu chromogénique, type ChromID Candida).

Les automates de cytologie urinaire estime également la bactériurie mais sans différencier les bactéries mortes des bactéries vivantes. Un dénombrement sur gélose reste nécessaire.

Coloration de Gram

Elle manque de sensibilité et pour les urines présentant une faible bactériurie (≤ 104 UFC/mL), il est nécessaire d’observer le culot de centrifugation. Cette coloration que ce soit sur l’urine non centrifugée ou sur le culot de centrifugation, est peu pratiquée. Elle présente pourtant certains avantages :

  • repérer s’il existe plusieurs types de bactéries ;
  • repérer des germes cultivant mal sur les milieux ordinaires (streptocoques, corynébactéries). Ainsi l’observation de coque Gram + en diplocoques et courtes chaînettes ou de bacilles corynéformes doit conduire à un isolement supplémentaire sur une gélose au sang.
  • supposer une contamination vaginale du prélèvement lors de l’observation de lactobacilles (bacille Gram positif) le plus souvent associés à la présence de cellules épithéliales pavimenteuses.

Coloration de Ziehl Neelsen ou à l’auramine

En absence de germes alors que la leucocyturie est supérieure à 104/mL et dans des contextes bien particuliers, il faut rechercher des mycobactéries. Pour cela, un frottis préparé à partir du culot de centrifugation des urines est coloré par une méthode révélant l’acido-alcoolo résistance de ces bactéries : coloration de Ziehl Neelsen, coloration à l’auramine). En présence de BAAR, il faut procéder à une décontamination des urines et ensemencer des milieux spécifiques : MGIT, Loewenstein Jensen et Colestos. Pour plus de détails se référer à la page dédiée aux diagnostic des infections à mycobactéries.

 

Bactériurie ou DGU (= Dénombrement des Germes Urinaires)

Intérêt pour le diagnostic

Le dénombrement des germes urinaires (= DGU) est un critère fiable pour le diagnostic de l’infection si toutes les précautions ont été prises lors du recueil des urines, leur transport et leur conservation (Cf. paragraphe 7.1). En effet, les faibles contaminations liées aux bactéries présentes au niveau du méat urétral se traduisent par des bactériuries bien inférieures à celles des infections urinaires.

Méthodes de dénombrement

Le DGU peut être réalisé par différentes méthodes, dans tous les cas il est effectué à partir de l’urine entière bien homogénéisée.

  1. Méthode des dilutions

On réalise plusieurs dilutions de l’urine dans l’eau physiologique dans la gamme 10-2 à 10-7.
On incorpore 1 mL de chaque dilution, en boîte de Petri, à 20 mL de gélose nutritive fondue et refroidie à 45 – 50 °C. Mélanger soigneusement, laisser solidifier.
Après 24 h d’incubation à 37 °C, on compte les « unités formant colonies » (UFC) dans la boîte qui en contient entre 30 et 300. Le nombre ainsi déterminé, multiplié par la dilution, fournit le nombre d’UFC/mL d’urine.
Cette méthode longue et délicate ne peut être appliquée aux séries, donc à la routine. Elle sert encore de méthode de référence pour étalonner les méthodes plus adaptées à la routine et présentées ci-dessous.

  1. Méthode de la lame immergée

Cette méthode est détaillée à la page Méthodes de dénombrement
Cette méthode est intéressante car utilisable par le personnel soignant directement au chevet du malade.
Elle présente cependant comme inconvénient de ne pas permettre d’obtenir des colonies isolées avec les urines fortement infectées. Pour cette raison, on ensemence systématiquement un milieu d’isolement en parallèle.

  1. Méthode de l’anse calibrée de 10 µL

Cette méthode est détaillée à la page Méthodes de dénombrement
C’est la méthode la plus prisée actuellement. Des erreurs de quantification sont possibles qui proviennent d’un ensemencement incorrect de l’urine (volume mal calibré, mauvaise technique d’isolement) voire de conditions d’incubation et de durée non adaptées.
Les milieux utilisés sont des milieux non sélectifs.
Il existe des systèmes d’ensemencements automatisés de gélose en boite de Petri (annexe 5 : PREVI™ Isola (bioMérieux)

Isolement

Choix des milieux

La plupart des infections urinaires sont monomicrobiennes et dues à des entérobactéries donc à des bactéries non exigeantes. Un milieu de base NON SÉLECTIF suffit le plus souvent.

Si ces milieux sont ensemencés selon la technique de l’anse calibrée alors les opérations isolement et dénombrement des germes urinaires seront simultanées.

Les milieux chromogènes (chromID™ CPS® (CPS3), UriSelect4®..)

Malgré un prix élevé, on les préfère aux milieux classiques (BCP, CLED). Ils permettent :

  • une très bonne différenciation des colonies grâce à leur coloration et donc une bonne sensibilité de détection des urines polymicrobiennes,
  • une identification directe d’Escherichia coli, du genre Enterococcus, et de Proteus mirabilis moyennant la réalisation de tests complémentaires simples (EF, indole),
  • une orientation de l’identification des KESC et des autres espèces de Proteus, des genres Providencia ou Morganella,
  • une économie de réactifs (galeries…) et de temps de manipulation pour le technicien.
  • l’instauration plus rapide d’une antibiothérapie rationnelle.

Voir les pages Gélose UriSelect4® et Gélose ChromID™CPS®

Tableau 8 : Enzymes recherchées sur les milieux chromogènes


a Proteus Providencia Morganella
b
Klebsiella, Enterobacter, Serratia, Citrobacter
c le test indole sera positif pour Escherichia coli et les Proteus indologènes et négatif s’il s’agit de Proteus mirabilis

Limites des milieux chromogènes

Parfois des bactéries (surtout en milieu hospitalier) n’ont pas les caractères enzymatiques attendus ou en ont acquis d’autres. Exemples :

  • De rares souches de Citrobacter freundii indole +et ß-glucosidase – peuvent être identifiées comme étant Escherichia coli
  • Streptococcus agalactiae peut donner des colonies turquoise mais elles sont plus pâles que celles des Enterococcus
  • Certaines souches de Proteus vulgaris possèdent une ß-glucosidase, ceci peut se traduire par une coloration verte des colonies avec ou sans brunissement de la gélose

Ces quelques exemples montrent l’importance de rester vigilant et de confronter les résultats de l’antibiogramme avec l’identification. En outre, ces milieux ne prétendent pas isoler tous les germes urinaires ; il conviendra donc d’ensemencer un ou plusieurs milieu(x) supplémentaire(s) choisi(s) en fonction des résultats de l’examen microscopique et du contexte (exemple : gélose au sang pour la recherche de Streptococcus B ou de corynébactéries).

On ajoutera une gélose Sabouraud ou un milieu chromogène adapté en cas de présence de levures à l’examen direct. Incubation à 37°C.

Les milieux non sélectifs sont suffisants en général mais si on observe plusieurs germes à l’examen microscopique, la suite de l’analyse sera facilitée en ajoutant des milieux SELECTIFS.

Conditions d’incubation

On place les boîtes à 37°C pendant 18 à 24 heures.
Pour ne pas sous estimer la bactériurie, on prolonge l’incubation de 48 heures si on suspecte un germe à croissance lente ou en cas de discordance entre le Gram et la culture.

Interprétation des résultats de l’ECBU

L’interprétation de l’ECBU est difficile et tient principalement compte de 5 critères :

  • la leucocyturie,
  • la bactériurie,
  • le nombre d’espèces isolées,
  • la classe d’uropathogénicité des espèces isolées
  • le contexte clinique.

Voir les tableaux A, B et C qui montrent l’interprétation de l’ECBU en fonction de ces différents critères.

La leucocyturie

Elle renseigne sur le présence ou l’absence d’une inflammation du tractus urinaire

  • Une leucocyturie (< 104 leucocyte/mL) indique qu’il n’y a pas de réaction inflammatoire ce qui permet souvent d’exclure une infection urinaire sauf si le sujet est neutropénique ou s’il s’agit d’une infection débutante.
  • Une leucocyturie (³ 104 leucocyte/mL) est le signe d’une inflammation, témoin d’une infection urinaire.
    Attention : on observe très souvent une leucocyturie chez les patients porteurs d’une sonde urinaire à demeure, dans ce cas ce critère ne contribue pas au diagnostic.

La bactériurie

Dans une urine de milieu de jet recueillie en évitant toute contamination est le reflet de la concentration bactérienne dans l’urine vésicale. C’est donc le paramètre principal pour le diagnostic de l’infection.

  • Une bactériurie < 103 UFC/mL indique une absence d’infection (si le patient n’est pas sous antibiothérapie, ni hyperhydraté et si le temps de d’abstinence urinaire est supérieur à 3 h)
  • Une bactériurie ≥ 105 UFC/mL indique très souvent une infection urinaire chez un sujet symptomatique.

 

Le groupe d’uropathogénicité des espèces isolées

Selon les recommandations de « l’european guidelines for urine analysis » les microorganismes sont classés en 4 groupes selon leur pouvoir uropathogène. Chez un sujet présentant les symptômes d’une cystite et une leucocyturie ≥ 105 leucocyte/mL, les seuils de bactériurie permettant de conclure à une infection urinaire dépendent du groupe d’uropathogénicité. Ils sont de 103 UFC/mL pour le groupe 1, de 104 UFC/mL pour le groupe 2 et de 105 UFC/mL pour les groupes 3 et 4.

Groupe I

Escherichia coli, Staphylococcus saprophyticus. Ces bactéries sont reconnues responsables d’infections urinaires même en faible quantité (à partir de 103 UFC/mL). Les Salmonella spp et les mycobactéries font également partie de ce groupe mais on les rencontre rarement.

Groupe II

Les autres entérobactéries (Klebsiella spp, Proteus spp, Enterobacter spp, Citrobacter spp, Morganella morganii, Providencia stuartii…), Enterococcus spp, Pseudomonas aeruginosa, Staphylococcus aureus, Corynebacterium urealyticum, et Haemophilus spp (rare) et Streptococcus pneumoniae (rare). Ces bactéries sont moins fréquemment responsables d’infections urinaires et quand elles le sont, il s’agit le plus souvent d’infections nosocomiales ou bien il existe des facteurs anatomiques ou iatrogènes favorisants. Le seuil de pathogénicité est fixé à 104 UFC/mL pour la femme et 103 UFC/mL pour l’homme.

Groupe III

Streptococcus agalactiae, Aerococcus urinae, les staphylocoques à coagulase négative (autres que S. saprophyticus)

Acinetobacter baumanii, Stenotrophomonas maltophilia, Burkholderia cepacia, autres Pseudomonadaceae et Candida spp. Pour ces germes, plusieurs critères doivent être réunis pour les impliquer dans une infection urinaire. Ces critères sont :

  • une quantité élevée ( 105 UFC /mL),
  • au moins 2 échantillons d’urines positifs à un même germe (ou présence dans une urine recueillie par ponction sus-pubienne)
  • et, si possible, des critères cliniques ou d’inflammation.

Isoler des staphylocoques à coagulase négative (autres que S. saprophyticus) dans une urine est souvent le fait d’une contamination ou d’une simple colonisation plutôt que d’une réelle infection. Candida spp peut être responsable d’infection urinaire mais surtout chez des patients porteurs de matériel étranger ou ayant subi une endoscopie ou un acte chirurgical et traités par des antibiotiques

Groupe IV

Streptocoques alpha hémolytiques, Lactobacillus spp, Gardnerella vaginalis et bacilles corynéformes (autres que C. urealyticum et C. seminale). Ce sont des bactéries de la flore urétrale ou génitale de proximité à considérer en général comme des contaminants.
On les prend en compte seulement s’il s’agit d’une ponction sus-pubienne.

Le nombre d’espèces isolées

Les infections urinaires sont le plus souvent monomicrobiennes.
Les infections communautaires bimicrobiennes sont rarissimes.
15% des infections urinaires nosocomiales sont bimicrobiennes, le plus souvent à la suite d’un geste invasif ou de sondage.

Retrouver plus de 2 germes dans une urine est le signe d’une contamination du prélèvement : il faut refaire un ECBU sur un autre prélèvement.

Dans le cas des urines bimicrobiennes, deux éventualités sont à envisager :

  • présence d’un germe à signification pathologique et d’un contaminant provenant généralement de la flore cutanée, vaginale ou intestinale ;
  • présence de deux germes à signification pathologique.

Souvent un deuxième ECBU permettra de trancher. Un pronostic peut cependant s’appuyer sur les proportions de chaque germe :

  • si un germe est largement majoritaire, il est probable que le second soit un contaminant ;
  • si les deux germes sont en proportion équivalente, l’infection bimicrobienne est le plus probable.

Dans tous les cas, la présence de deux types de colonies doit être signalée et décrite dans le compte rendu.

Le contexte clinique

Il faut particulièrement tenir compte :

  • des symptômes ;
  • de la présence d’un facteur de risque (sondage urinaire, intervention sur les voies urinaires) ;
  • d’un éventuel traitement antibiotique en cours ;
  • d’une grossesse.

La présence de symptômes permet de distinguer une infection urinaire d’une colonisation. On parle de colonisation lorsque l’urine présente des critères d’infection urinaire pour un patient sans symptôme.

 

 

 

 

 

 

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