Le cœur est un muscle creux, qui réunit deux parties indépendantes : le cœur droit et le cœur gauche.
Chaque partie, droite et gauche, se compose d’une oreillette qui reçoit le sang des veines et d’un ventricule qui en se contractant expulse le sang dans les artères.
L’oreillette droite reçoit du sang désoxygéné de diverses parties de l’organisme par les veines caves et le sinus coronaire. Elle l’envoie ensuite dans le ventricule droit qui lui l’expulse dans l’artère pulmonaire. Là le sang est débarrassé du gaz carbonique et alimenté en dioxygène. Le sang oxygéné retourne au cœur par les veines pulmonaires qui le déversent dans l’oreillette gauche. Il passe ensuite dans le ventricule gauche qui en se contactant le propulse dans l’aorte. De là le sang est conduit dans les capillaires de tous les organes du corps, puis retourne au cœur droit par les veines caves.
Les 4 valves cardiaques, sous l’action des variations de pression produites par la contraction et la relaxation du cœur, forcent le sang à circuler dans une seule direction. En effet, elles s’ouvrent pour le laisser passer, puis se ferment pour l’empêcher de refluer. Bien évidemment, leur étanchéité est indispensable au bon fonctionnement du cœur en tant que pompe.
L’endocarde tapisse la surface interne du cœur et recouvre les valves cardiaques. Il comporte un endothelium (revêtement pavimenteux simple) reposant sur une couche de tissu conjonctif contenant des fibres de collagène et des fibres élastiques.
Fig. 1 : Circulation du sang dans le cœur
à partir de CC-BY-SA-3.0, via Wikimedia Commons
L’endocardite infectieuse résulte de la colonisation, par des bactéries circulant dans le sang, d’une végétation fibrinoplaquettaire initialement stérile qui s’est développé sur un endocarde lésé (valvulopathie, dégénérescence due à la vieillesse, présence de matériel étranger, inflammation lié à un rhumatisme articulaire aigu)
Les germes se fixent puis se multiplient et se recouvrent peu à peu de thrombocytes et de fibrine. Ainsi la végétation s’accroit par formation de couches successives. En outre, il peut y avoir plusieurs végétations. Elles mesurent de quelques millimètres à un centimètre ou plus. Très souvent, elles se situent sur les valves cardiaques et perturbent alors leur fonctionnement (leur étanchéité) à l’origine d’insuffisance cardiaque. La population bactérienne au sein de ces végétations infectées est très élevée. En outre, les bactéries les plus profondément enfouies sont peu accessibles à l’action des antibiotiques.
La végétation septique constituée de fibrine, de plaquettes et de bactéries peut se fragmenter en embols (septiques ou non). Ces embols vont ensuite se disséminer dans l’organisme. L’infection se généralise alors et les complications sont multiples : risque d’embolies (obstructions de vaisseaux notamment au niveau du SNC), d’infections à distance (foyers secondaires : SNC, viscères abdominales, os, articulations..) de vascularites (dépôts de complexes immuns induisant une inflammation de la paroi des vaisseaux sanguins) etc..
Fig.2 : Physiopathologie des endocardites infectieuses
© Marielle Maye-Lasserre
Les signes cliniques sont variables.
On observe le plus souvent une fièvre (presque toujours constante) associée à un souffle cardiaque. La perte d’appétit, une anémie, une splénomégalie et des infections métastasiques sont presque toujours présents.
Parfois il y a des signes cutanés évocateurs (pétéchies, érythèmes, nodosités..).
L’insuffisance cardiaque est la 1ère cause de mortalité à la phase aiguë de l’infection suivie par les complications neurologiques.
L’endocardite infectieuse est une pathologie assez rare (incidence estimée en France à 31 cas /an/ million d’habitants) mais grave avec une mortalité élevée (20 à 30%) en l’absence de traitement adapté.
On différencie les endocardites infectieuses à hémocultures positives des endocardites infectieuses à hémocultures négatives
Le profil épidémiologique a considérablement changé ces dernières années :
Tableau 1 : Microorganismes responsables d’endocardites infectieuses en France (source REMIC 2010)
1 ces 2 espèces faisaient auparavant partie de l’espèce S. bovis ;
2 Staphylocoques à coagulase négative ;
3 parmi les autres germes identifiés se trouvent des bacilles à Gram négatif (Enterobacter aerogenes, Klesiella oxytoca ; Legionella spp).
On parle d’endocardite infectieuse à hémoculture négative quand plusieurs séries d’hémocultures n’ont pas montré de signes de positivité.
Elles représentent environ 10 % des cas d’endocardites infectieuses (entre 2,5 et 31% selon les études).
Les principales causes de la négativité des hémoculture lors d’endocardites sont rassemblées dans le tableau 2. La première cause est l’administration au patient d’un traitement antibiotique avant la réalisation des hémocultures ce qui a « décapitée » l’infection.
Des techniques autres que les hémocultures ont permis ces dernières années de mettre en cause des microorganismes de croissance difficile ou impossible sur milieux habituels
Ce sont des bactéries intracellulaires facultatives qui parasitent les hématies et transmises en général par des arthropodes hématophages. Plusieurs espèces peuvent être responsables d’endocardites :
Cette bactérie est responsable de la fièvre Q, zoonose ubiquitaire. Les mammifères animaux infectés éliminent la bactérie dans leur environnement par leurs déjections et massivement lors de la mise-bas. L’homme s’infecte en inhalant des poussières contaminées avec ces produits de parturition ou bien par ingestion de produits laitiers non pasteurisés. C’est une bactérie intracellulaire obligatoire qui se multiplie dans les phagolysosomes à pH 5 des macrophages des hôtes qu’elle infecte. Elle est responsable d’endocardite sur prothèse valvulaire ou sur valves cardiaques présentant des lésions.
C’est l’agent de la maladie de Whipple, maladie longtemps considérée comme une maladie digestive chronique. En fait l’infection atteint plusieurs organes : le patient présente des signes digestifs (le plus souvent), des arthralgies et/ ou des adénopathies éventuellement associées à des lésions cérébrales ou cardiaques. Il est possible que le patient souffre d’une endocardite isolée, sans atteinte digestive, ce qui rend le diagnostic particulièrement difficile. Cette infection atteint surtout les hommes d’environ 50 ans ayant des anomalies immunitaires et elle serait transmise par voie orale.
Tableau 2 : Principales causes de la négativité des hémocultures lors d’endocardite, éléments d’épidémiologie
Le diagnostic des endocardites infectieuses est clinique et microbiologique :
Il est donc utile que le biologiste soit averti de la suspicion d’endocardite chez le patient afin de mettre en œuvre les techniques les plus adaptées.
Dans cette page est seulement décrit ce qui est particulier au diagnostic des endocardites ; ce qui est en commun avec le diagnostic des autres bactériémies est présentée à la page Diagnostic au laboratoire des bactériémies
Les hémocultures permettent d’isoler le micro-organisme responsable de l’endocardite dans plus de 90 % des cas.
Les recommandations sur le prélèvement sont différentes de celles préconisées pour l’étude des autres bactériémies.
Le choix des milieux et/ou de la technique de prélèvement est important et peut être différent pour la 2ème série :
La majorité des germes cultivent en quelques jours, mais il faut parfois un temps plus long pour isoler des microorganismes à croissance lente et/ou difficile. Il est donc indispensable d’incuber les flacons à 37°C pendant au moins 15 jours et jusqu’à 1 mois.
Lorsque la présomption d’endocardite est forte, et si les hémocultures restent négatives, le biologiste doit recourir à d’autres méthodes pour rechercher les agents étiologiques. Le tableau 3 résume ces méthodes ; la sérologie est l’examen le plus fréquemment utilisé en routine.
Tableau 3 : Principales méthodes utilisées pour le diagnostic des endocardites infectieuses à hémoculture négative
a La biologie moléculaire est un outil conseillé en cas d’hémoculture négative mais reste une technique réservée à certains laboratoires seulement. Une amplification génique suivie d’une analyse des données de séquençage peut être réalisée soit sur le sérum soit sur le tissu valvulaire. Plusieurs amplifications sont possibles :
Le diagnostic d’endocardite infectieuse repose sur la conjonction de données cliniques et microbiologiques.
Il existe une classification internationale (critères de Duke modifiés par Li et al.) permettant de classer le diagnostic en certain, possible ou exclu selon la présence ou non de critères majeurs ou mineurs.
Tableau 4 : Critères de Duke modifiés pour le diagnostic d’une endocardite infectieuse